mercredi 6 janvier 2010

Atelier du 15 décembre 2009, animé par Françoise G

A partir des planches des albums « un homme » et « Champion » de Gilles Rapaport

Consignes :

1. Au cœur de l’exposition de Gilles Rapaport, les participantes à l’atelier d’écriture se baladent dans l’exposition et s’imprègnent de l’atmosphère des planches.
2.Chacune jette sur une feuille les mots qui sont nés de cette immersion.
3. Puis sur une grand feuille, tous les mots sont posés et en font naître de nouveau. Fresque de mots colorés et violents qui se construit dans un silence habité.
4. Après ce temps collectif, chaque participante retourne dans sa tête et face à sa feuille, pour construire avec ces mots ou non, un texte en lien avec l’exposition.



Lydie / Pour conjurer le malheur Lydie est allée piocher dans les deux albums pour pouvoir créer un puzzle du bonheur
5 images pour inverser la tendance
pour que le sale soit propre,
la douleur soit douceur,
l’espoir devienne la réalité.

1. (planche : village coloré) Au bord de mer, un pays coloré, des odeurs amicales une culture familiale, l’humeur est bonne comme la douceur, les épices et la chaleur.
2. (planche : La famille) Eux ils sont heureux.
3.(planche : boxeur) Lui rêve de carrière de boxeur pour assurer la vie, l’avenir de son rêve à elle.
4.(planche : la nourrice et le bébé) Un bébé, un bébé blond qui grandirait dans une culture où la mixité serait une famille.
5. (planche : un homme dans une forêt luxuriante) La richesse serait une vie ensemble au milieu d’une nature luxuriante où l’on travaillerait, jouerait, vivrait en harmonie avec elle, avec eux, avec lui.
Il est encore temps d’espérer, de rêver.
Moi, je les aime eux, les autres parce qu’ils sont en somme un peu comme toi, un peu comme moi et surtout différents de toi, de moi.

Françoise G / Sa mémoire a été titillée ….
Françoise a construit sa balade et son texte sur les illustrations de Champion et plus particulièrement sur les 6 planches du combat dans la neige

Des mots violents, cruels, désespérés alors me sont venues, des images oubliées, celles que le récit de mon grand-père déporté m’avait fait, il y a longtemps et que je n’ai pas oublié.

Les mots qui me sont venus :
La neige en deuil – la lune froide – seul seul seul – absence – marionnettes – théâtre – fantômes – danse macabre – pas de cri – plus rien n’existe – silence de plomb – ombres chinoises – voile de haine – chienne de mort – vide sidéral – abandon – pas d’échappatoire – pas de mot pour le dire – faire face – bleu comme la nuit – s’abandonner – étourdissement – matraquage – sacrifier – inexorable – obéissance aveugle – s’acharner – compte à rebours – poussière de neige – décharné – acharné – ne rien penser

Un texte :
Je suis allée hier dans ce théâtre
Le rideau a tardé à se lever.
Un univers glauque,
Une lumière blafarde,
Très loin, là-bas en banlieue,
Une banlieue sinistre et froide
Où même la lune s’ennuie.
Peu de monde.
Je me suis assise dans l’ombre,
Sous un balcon.
Cela sentait la reconstitution.
Des fantômes en loques erraient ça et là,
On n’avait pas jugé bon de leur mettre des chaines,
Mais la bande son cliquait
Leur désespoir semblait factice,
Ils n’étaient pas assez maigres pour les rôles,
Et même s’ils se courbaient comme sous le poids d’une grande d’espérance
On n’y croyait pas.
Alors je n’ai plu regardé.
Je n’avais pas besoin de marionnettes macabres pour ressentir toute la souffrance du monde.
Je n’avais rêvé ce soir là que de me détacher de mes propres problèmes, petits et mesquins d’accord mais envahissants tout de même.
Je me suis mise alors à rêver de soleil, de champs verdoyants, de calme, de sourires confiants, d’hommes et de femmes accueillants, de petits bonheurs de tous les instants.
Il faisait trop chaud dans cette salle, la poussière des fauteuils de peluche rouge me faisait tousser.
Mais la petite grotte dans laquelle je m’étais réfugiée, se renfermement sur moi, confortable et douillet.
Je me sentis soudain curieusement apaisée
Quand les maigres applaudissements m’ont réveillée,
Je me suis étirée,
Détendue et paradoxalement alerte.
Je suis sortie sans croiser le regard de quiconque.
J’ai regardé la lune.
Les ombres colorées qu’elle projetait sur les immeubles, sur les quelques arbres maigrichons, sur moi.
Et je me suis sentie bien .


Patricia : Passé-présent
Les mots :
Douleur- désespoir – fragilité – colère – révolte – incompréhension – folie – pourquoi ?? - pantin – sang – mort – rien – humain – petit bout de rien – fumée noire – corps décharné – comme un enfant - crâne tondu – ne pas oublier – et dieu dans tout ça ? – se nourrir de sang – regard – le dormeur du val – rêve en couleur / vie en noire

Un texte
Je suis la fille d’un peuple qui se nourrit de sang. La violence et l’exploitation sont nos lots quotidiens. Attention, nous sommes un peuple intelligent, pas des barbares! Avant de faire tout cela, nous étudions, légiférons, légalisons. Nous sommes des êtres performants qui ont le talent d’organiser les systèmes en tout genre..et le plus souvent des systèmes qui décharnent, déchiquettent, hachent proprement, tout en respectant l’environnement. Le développement durable, ça nous connait !
Aujourd’hui, j’ai décidé de fuguer …

Rita : J'aurai sa peau!
J'aurai sa peau!
Non, sa peau, j'en veux pas. Je suis noir, noir je resterai.
Non, je ne veux pas sa peau, je veux le démolir comme ses semblables ont démoli les miens.
L'esclavage, l'humiliation, les coups, le fouet, les cris… c'est loin mais je n'oublierai jamais, jamais! Pourquoi j'oublierai?
Et puis, ce type qui est venu au village, avec sa peau blanche, ses yeux clairs, ses beaux habits… Ma sœur, elle s'est laissé séduire, il l'a déshonorée… Un bébé blond! Elle a mis au monde un bébé blond!
C'en était trop, je suis parti. J'ai tout quitté.
Maintenant, lui, il va payer.
Lui aussi il a souffert. Les camps… il parait qu'on emmenait les gens dans des wagons à bestiaux, ses parents ou ses grands-parents, je ne me souviens plus, sont morts là-bas. Je ne sais plus qui me l'a raconté. Eux aussi ont les battait, on les traitait pire que des bêtes… parce qu'ils étaient juifs, je crois.
Même entre blancs, ils se démolissent, faut croire qu'il y en a qui sont plus blancs que d'autres. Quelle folie!
Bon, les noirs n'ont pas à la ramener. Découper ses voisins à la machette, y'a pas de quoi être fiers…
Mais je m'en fous. Il m'énerve avec ses yeux bleus, son air doux et ses gants rouges. Je vais lui casser la gueule, oui, lui casser la gueule.
Ce soir, c'est moi qui serai le champion!

France

Quatre frères enchaînés relevant la tête. Se soumettront-ils ? Sûrement pas, ils ne sont pas une marchandise. Leurs regards disent toute l’énergie dont ils sont capables pour se libérer du mépris dont ils sont victimes. La solidarité qu’exige ce combat sera-t-elle à la hauteur de leurs espoirs ?.

Commentaire : Le 4ème personnage n’est pas enchaîné, il pousse les autres et il est muni d’un arc.
Un homme noir, armé, conduit trois de ses frères entravés en esclavage. Être frères de race ne veut pas dire fraternité. Ces trois regards disent toute l’énergie dont ils sont capables pour se libérer du mépris dont ils sont victimes. L’homme armé est déterminé. La solidarité qu’exige ce combat sera-t-elle à la hauteur de leurs espoirs ?


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